Vendredi 22 mars 2019, au Hang.Art, la rencontre des Poètes sans frontières avec Alain Morinais a ouvert des horizons nouveaux.
D’abord, les réponses, on ne pouvait plus sincères qu’Alain Morinais a fourni à Vital Heurtebize et aux autres participants, nous ont fait comprendre que la poésie est une chose extrêmement simple. En même temps, elle représente un but très difficile sinon impossible à atteindre. Ou, plus précisément, la poésie ne peut jamais se configurer comme un but. La poésie, chez un poète vrai comme Alain Morinais, jaillit toute seule, à partir d’un mot ou d’une nébuleuse d’émotions.
Ensuite, on
a bien appris que chacun doit trouver la façon de s’exprimer qui lui correspond
le mieux. Alain Morinais nous a expliqué que son roman sur la condition
féminine à cheval de deux siècles passés avait été, pour lui, une épreuve dure
et assez contraignante, à laquelle il avait finalement réagi, s’adonnant à l’écriture
libre de la poésie. Son témoignage m’a fait revenir à l’esprit un long cortège
de poètes qui se sont efforcés d’écrire des romans en y déversant forcément
leur langage poétique dense et visionnaire. Je pense d’abord à des exemples
italiens, tels Ugo Foscolo ou Cesare Pavese, qui nous laissent quand même des
chefs d’œuvre inoubliables. Je pense aussi à l’un de mes préférés, Alvaro
Mutis, qui a suivi un processus créatif tout à fait unique, achevant d’abord
les poèmes ayant pour personnage principal le gabier Maqroll, réécrivant
successivement les romans de Maqroll en prose.
Dans le cas d’Alain et de sa poésie extrêmement
limpide et moderne, j’admire aussi la cohérence dans la recherche de sa
véritable vocation, de son authentique registre, et je suis vraiment touché par
son courage : il n’a pas hésité à choisir pour le mieux !
Enfin, nous avons constaté que l’on peut entreprendre
l’art de la poésie à n’importe quel âge. C’est la vie même qui décide.
Marguerite Yourcenar disait qu’il faut attendre cinquante ans avant
d’entreprendre un premier roman. C’est exactement ce qu’a fait Alain Morinais.
Pour écrire, il faut savoir créer une distance vis-à-vis des faits, des lieux
et des personnages qu’on a envie de rendre éternels. Il faut créer autour de soi
un rideau invisible pour y nourrir une vie parallèle à l’enseigne de la
liberté.
Et voilà comment Alain Morinais l’entend, sa liberté. Dans une poésie, très emblématique, consacrée à son enfance, il nous confie son plus intime secret : « Quand il était/Ce qu’il voulait/On lui disait/Mais qu’est-ce qu’il te prend/Quand il était ce qu’on voulait/On ne lui disait plus rien/Alors il a décidé d’être dedans/Comme il l’entend/Mais les mots se cognaient aux cloisons… »
Tout au long d’un intervalle consacré au travail « délirant », les mots du poète sont restés accrochés à ces cloisons, au « verre de ses silences », jusqu’au moment où il a découvert que sa poésie pouvait briser les verres de ces cloisons et en même temps, se réjouir de ce coin solitaire, le lieu mieux adapté pour s’exprimer librement et y revivre petit à petit les miracles de la vie.
Giovanni Merloni
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Un mot sympathique, un avis avisé, une critique fine… Quel que soit votre commentaire, merci par avance. Alain MORINAIS